
La scène des arrestations arbitraires: Le jardin public de Bonamoussadi à Douala au Cameroun. (Photo de Jacks Oke)
Par Jacks Oke

Panneau de la Brigade Territoriale de Ndogbong à Douala (Photo de Jacks Oke)
Coco, jolie fille de 19 ans, et Vivi, âgée de 20 ans très hommasse, toutes deux élèves dans la ville de Douala, ont été victimes d’une arrestation arbitraire par les éléments de la brigade de Gendarmerie de Ndogbong alors qu’elles faisaient une balade au jardin public de Bonamoussadi le vendredi 8 décembre 2017 aux environs de 21 heures.
Après rencontre et échange avec les deux victimes (pour qui les pseudonymes sont utilisés dans cet article, pour la securité), celles-ci résument leur déclaration
faite aux gendarmes:
« Nous ne sommes pas en couple mais juste de bonnes amies. L’amitié entre fille est-elle criminelle ? Nous ne cesserons sans doute de nous questionner sur ce fait. Nous nous sommes fixées une rencontre au jardin public de Bonamoussadi afin de discuter de nos problèmes respectifs. Notons que ce jardin est d’ailleurs très fréquenté dans la ville. C’est un lieu ouvert » .
Dans les faits, Coco serait arrivée la première au lieu de la rencontre aux environs de 21 heures. D’une beauté angélique et d’un charme incontournable, elle aurait vite fait de repousser les multiples avances des hommes présents sur les lieux. Ces derniers très déçus de leur échec, remarquant la compagnie de Coco aux cotés de Vivi très hommasse étant arrivée à son tour sur les lieux, n’ont cessé de balancer des paroles désobligeantes: « lesbiennes », « suceuses » et autres. Très vite l’attroupement a fait scène dans un combiné de regards scandaleux et de paroles blessantes. Vers minuit, les gendarmes alertés, les deux amies comme elles l’affirment ont été brutalisées, arrêtées et conduites à la gendarmerie sur le motif de « lesbianisme ».

La gendarmerie où Coco et Vivi ont été détenus et torturés. (Photo de Jacks Oke)
Après interviews poussés et torture physique (bastonnade inhumain à coups de machette, visages amochés à coups de chaussures militaires), les deux victimes n’ont pas eu le choix que de passer aux aveux attendus (accepter qu’elles sont lesbiennes et en couple) par lesdits gendarmes sur procès-verbal.
Durant trois jours de sévices intenses, tortures et traitements cruels inhumains et dégradants (les deux filles étaient menottées et suspendues à la fenêtre d’où une position debout), les parents des victimes les ont assistées sans toutefois pouvoir leur faire gagner leur liberté. Apres plusieurs pressions exercées par les points focaux de la plateforme UNITY présents dans la ville de Douala avec le concours desdits parents, une somme de 100.000 CFA (environ 152 euros) a été demandée par lesdits gendarmes en contrepartie de la liberté des filles.
À cet effet, maintes quêtes et démarches aux fins de recouvrir ledit montant ont été entreprises. La somme collectée et versée en deux tranches entre les mains des gendarmes le 11 décembre, les deux filles ont été libérées l’une après l’autre et exemptées de toute poursuite.
Voilà la justice camerounaise, celle qui condamne sur de simples suspicions et allégations. Celle qui s’inspire des revendications et ressentis homophobes. Devrait-on être condamné sur un simple délit de facies ? Nina Bouraoui dira à cet effet :
« Si on est homosexuel, ce n’est pas pour mimer les autres! L’homosexualité n’est pas une alternative à l’hétérosexualité. C’est autre chose, une autre forme d’amour ».
Jacks Oke, l’auteur de cet article, est un militant pour les droits LGBTI au Cameroun qui écrit sous un pseudonyme.
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