Un extrait d’un essai dans le HuffPost Tunisie par Farhat Othman, juriste tunisien, chercheur et écrivain:
Le défi à gagner de l’homophobie en Tunisie

Farhat Othman (Photo de Kapitalis.com)
L’association Shams a annoncé avoir reçu le 4 janvier une notification par huissier de la part du chargé du contentieux de l’État d’une ordonnance sur requête décidant la suspension de ses activités pour 30 jours.
Une demi-victoire de Shams contre l’obscurantisme
Cela fait suite à une interpellation du gouvernement lors d’une séance à l’Assemblée durant laquelle on a eu une sortie haineuse de la part d’un député du parti islamiste. Une telle imprécation aurait dû lui valoir pour le moins un rappel à l’ordre de la part du président de la séance de ce jour-là et des réprimandes de la part du chef de file de son parti qui se prétend démocrate sans le prouver.
Il est à rappeler que Shams a l’honneur de militer pour l’abolition de l’homophobie en Tunisie en tant que tare héritée de la colonisation et violation caractérisée des valeurs humanistes consacrées par la Constitution et par l’islam.
Loin d’affaiblir la vaillante association, cette suspension doit la renforcer davantage dans la droite ligne de ce que dit le philosophe, à savoir que ce qui ne nous tue pas nous rend forts ! Elle est même la preuve que Shams est une réalité dont on ne peut plus faire abstraction dans la nouvelle Tunisie se voulant démocratique, et que son combat est des plus légitimes.
En effet, l’homophobie est une négation absolue de toutes les valeurs basiques de l’État de droit, dont celle du vivre-ensemble paisible qui impose le respect du différent absolu; or, l’homosensuel (mon terme pour l’homosexuel) en est aujourd’hui la figure emblématique en terre d’islam.

Logo de Shams
Aussi, une telle décision mi-figue mi-raisin est au vrai une demi-victoire de Shams et des militants humanistes contre l’obscurantisme qui souhaitait rien de moins que la faire taire à jamais, l’interdisant de toute activité définitivement.
Nos épreuves sont nos leçons
Toutefois, il reste à l’association de saisir cette occasion pour en faire cette épreuve dont on profite pour tirer les leçons qui s’imposent et réaliser le bilan nécessaire de ses erreurs en vue de repartir dans un mois sur des bases bien solides, balisant le sentier du succès pour le bonheur de tous et l’avenir radieux d’une Tunisie véritablement démocratique.
Déjà, son premier vice-président, contraint à l’exil après des menaces de mort, l’avait bien reconnu : l’association a commis des erreurs de communication.
De fait, toute la stratégie de Shams, depuis sa création en mai 2015, a été mauvaise, concentrée sur la défense des droits de l’Homme sans référence aucune à leur dimension islamique, pourtant incontournable. Est-il possible, en effet, de faire la moindre avancée en la matière dans un pays de tradition islamique où l’homosensualité (homosexualité) est supposée interdite par une religion qui est constitutionnellement religion du pays ?
En se limitant à un militantisme reprenant les arguments laïques certes pertinents, mais aussi dogmatiques que ceux des intégristes religieux et surtout sans écho auprès des larges masses, l’association a ainsi négligé une évidence primaire de la stratégie qui consiste à faire usage d’armes efficaces. En l’occurrence, elle a attaqué un tank avec une arme blanche !
Or, l’arme fatale contre l’homophobie en Tunisie existe désormais ; c’est l’argument irréfutable que l’islam n’est pas homophobe. Des essais et des articles nombreux ont été publiés en ce sens, mais Shams n’a pas jugé utile d’en faire usage, se condamnant à subir sans réaction les attaques indignes d’islamophobie.
Aussi, en se résolvant enfin à user d’une telle arme, Shams sortira bien forte et plus efficace que jamais de cette épreuve qui aura alors été finalement bienvenue, augurant d’une maturité nécessaire et d’une lucidité inévitable et faisant admettre la légitimité de l’homosensualité en islam. …
Lire l’essai entier intitulé « Le défi à gagner de l’homophobie en Tunisie » .
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