Afrique subsaharienne

RD. Congo : « Jérémie Safari va mieux ! »

Après une semaine d’angoisse à devoir se cacher à Bukavu (Sud-Kivu), en raison de menaces de mort, l’activiste des droits des personnes LGBTI+, Jérémie Safari, va beaucoup mieux. Il est le directeur exécutif de Rainbow Sunrise Mapambazuko/LGBTI. Pour 76crimes, nous l’avons interrogé pour pouvoir recueillir ses impressions et ressentis quant aux 96 dernières heures qu’il a passées. Aussi, nous avons sollicité également un de ses conseils, que nous appellerons Mikwiza Ilanga (pseudonyme), afin d’avoir un éclairage juridique sur la situation judiciaire de Jérémie.

Logo de Rainbow Sunrise Mapambazuko

Interview téléphonique réalisée le 28 et le 30 mars 2022.

Quels ont été les principaux développements relatifs à ta situation, au cours des dernières heures ?

Jérémie Safari : « Je suis arrivé à Kinshasa, le 24 mars dernier. C’est la capitale de la République Démocratique du Congo. La veille de mon arrivée à Kinshasa, dans la soirée, j’ai quitté discrètement Bukavu pour Goma, en prenant le bateau qui effectue la dernière traversée du lac Kivu.

La matinée du jour de mon départ, la police judiciaire locale était à ma recherche. Les faits qui me sont reprochés verbalement font échos à mon activisme en faveur des droits humains et à un supposé prosélytisme LGBTI, à destination de la jeunesse.

A présent que je suis dans la capitale à plus de 2200 kilomètres de Bukavu, je suis soulagé. Je compte rester ici chez un ami pour quelques semaines, avant d’étudier un hypothétique retour à Bukavu, quand la situation me le permettra. Il est inutile pour moi d’envisager un quelconque retour, tant que je n’ai pas les moyens financiers de pouvoir vivre dans un quartier sécurisé de la ville ».

Localisation de la République Démocratique du Congo et de ses villes en Afrique

Quelle est la situation juridique de Jérémie Safari ?

Mikwiza Ilanga : « L’inspecteur du parquet de Bukavu instruit le dossier de Jérémie dans une relative discrétion. Cependant, il est un secret de polichinelle à Bukavu que ce sont les activités de Rainbow Sunrise Mapambazuko/LGBTI, en faveur des personnes homosexuelles qui sont incriminées. D’aucuns parlent même de promotion de l’homosexualité.

D’un point de vue pénal, l’homosexualité n’est pas illégale en République Démocratique du Congo, car ce qui n’est pas interdit est autorisé. D’autre part, il existe bien l’article 176 du code pénal congolais qui sanctionne toute atteinte à la pudeur ou aux bonnes mœurs. Néanmoins, les activités de défense de la dignité humaine et des droits de la personne ne tombent pas sous le coup d’une infraction à la loi, selon moi.

Présentement mon rôle est de pouvoir préparer les droits de la défense, en servant d’interface entre le parquet et Jérémie Safari, afin de pouvoir mieux connaître le dossier, tout en évitant à ce dernier une inutile détention provisoire, aux termes d’une première audition ».

Image de la prison de Bukavu.

Jérémie, quel message aimerais-tu pouvoir adresser au reste du monde ?

Jérémie Safari : « Je ne suis pas le seul membre de mon organisation à être menacé de mort au quotidien. Seulement, j’ai eu la chance de pouvoir m’extirper d’une situation qui aurait pu m’être fatale. Aujourd’hui, je m’en suis sorti vivant, mais nul ne sait ce qui peut advenir demain. Des activistes des droits des personnes LGBTI meurent assassinés en République Démocratique du Congo.

L’an passé par exemple, l’artiviste transgenre Dorine Moka a été empoisonnée à Lubumbashi dans le sud du pays. Or nous ne voulons pas tous quitter nos pays, car c’est ici que l’on a besoin de nous. Néanmoins, confrontés à des menaces d’atteinte à nos vies, nous demandons davantage de réactivité à la société civile internationale, quant aux signaux d’alerte que nous lui adressons ».

Vous pouvez soutenir Jérémie Safari en faisant un don sur le lien suivant : https://www.rainbowsunrisemapambazuko.org/donate

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