Avec Jérémie Safari qui dirige Rainbow Sunrise Mapambazuko/LGBTI, aux termes de cette série de 5 articles portant sur l’Est de la RDC et le sud-Kivu, 76crimes a voulu revenir sur un bilan rétrospectif de l’année 2022, tout en esquissant les contours et les perspectives pour l’année 2023.
76crimes : « Quels ont été les moments clefs en 2022 ? »
Jérémie Safari : « Côté réussite, on a intégré le conseil des organisations de la société civile du sud-Kivu. Il s’agit là d’une reconnaissance notre place et de notre rôle en tant que défenseurs des droits humains, dans la région. Aussi, nous avons pu déployer avec succès nos activités de plaidoyer à destination des leaders politiques et religieux, aidés en cela par le contexte post-COVID. Le dialogue existe et on se bat pour le maintenir, même si souvent, nos positions sont diamétralement opposées. Au moins, l’abcès autour de l’homophobie est il brisé.
Côté échec, l’on relève une recrudescence des notifications de cas de viols correctifs de femmes trans et de femmes lesbiennes. Or, notre organisation n’est pas parvenue à pouvoir répondre aussi rapidement que voulu aux besoins d’appui à la relocalisation des victimes, puisque nos propres bureaux étaient assiégés un temps et nous avons été la cible de moult cambriolages. C’est l’appui médiatique à la campagne de sensibilisation internationale, à des cas d’esclavage de personnes trans, en RDC, qui nous a permis de pouvoir les exfiltrer de la région.
76crimes : « Quelles perspectives envisagez-vous pour 2023 ? »
Jérémie Safari : Nous souhaitons pouvoir mieux nous insérer dans les réseaux communautaires et pouvoir davantage embrasser les mobilisations de la société civile locale et internationale, sans que cela ne se fasse au détriment de notre sécurité, si l’on souhaite pouvoir briser notre isolement. Concernant la sécurité physique et matérielle des locaux et des membres de notre organisation, elle est directement corrélée à nos moyens économiques à pouvoir nous mettre en sécurité, sans avoir à quitter durablement la région pour se mettre à l’abri.
Dans l’attente d’améliorations, notre quotidien est ponctué d’exactions. Dans cette région en guerre depuis 30 ans où l’homophobie s’ajoute aux bruits des armes, la violence physique, on l’a presque tous vécus, au sein de la communauté. Dernièrement, mi-novembre, après un podcast diffusé sur radio Iriba FM, un des participants a été l’objet d’une violente bastonnade en retournant chez lui après que sa voix a été identifiée, quand il plaidait pour une meilleure inclusion sociale des personnes LGBTI.
Aujourd’hui, Rainbow Sunrise Mapambazuko héberge à travers ses membres la victime. Aussi, nous pouvons prendre en charge les frais d’hospitalisation. Toutefois, à plus long terme, cette insécurité constitue une épée de Damoclès sur chacun d’entre nous, ici.
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