Alors que le 17 mai approche, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les homophobies, les transphobies et les biphobies et du mois des fiertés, 76crimes est parti à la rencontre de Pierre Karleskind. Député européen français, affilié au groupe libéral Renew Europe, il est à l’initiative de la résolution du parlement européen en faveur d’une dépénalisation universelle de l’homosexualité, le 18 avril dernier.
Dans le contexte de backlash international à l’endroit des droits des minorités sexuelles et de genre, il nous explique le rôle du parlement européen, ainsi que les objectifs de cette résolution.

76crimes : « Quel est votre parcours ? »
Pierre Karleskind : « Avant d’être député européen depuis 2019, j’étais océanographe. En temps que parlementaire je m’intéresse aux sujets ayant trait à la pêche et aux océans, ainsi qu’aux droits humains.
Je ne suis pas tout à fait novice en politique, car avant de me rallier au parti présidentiel sous les couleurs de Renaissance, j’ai été au parti socialiste, en tant qu’ancien conseiller municipal à Brest et ancien conseiller régional de Bretagne ».
76crimes : « Quel est l’objectif de la récente résolution que vous avez porté, dite « résolution sur la dépénalisation universelle de l’homosexualité à la lumière des événements récents en Ouganda » ? »
Pierre Karleskind : « Le Parlement Européen à le deuxième corps électoral au monde après le parlement indien, avec 705 députés, depuis le Brexit. C’est une assemblée démocratique qui représente près de 450 millions d’européens. On vote des lois et l’on peut être influent auprès de la Commission européenne.
Un jeudi par mois se tient une réunion plénière à Strasbourg, où il est possible de faire passer une résolution en urgence, concernant les droits humains, comme celle qui nous concerne, en raison de l’adoption par le parlement ougandais d’une loi pénalisant l’homosexualité ainsi que la transidentité de la peine capitale.
Même si cette résolution a un rôle symbolique, c’est une façon de montrer aux minorités les plus opprimées que nous sommes à leur côté, à travers le monde. En outre, ce 18 avril, c’est l’ensemble des groupes parlementaires qui étaient d’accord quant à cette résolution portant sur la dépénalisation universelle de l’homosexualité, bien qu’ici c’était l’Ouganda qui était visé, car le président ougandais n’a pas encore promulgué la loi.

Après cette résolution ne fait que citer et reprendre de grands principes énoncés à travers de multiples textes internationaux, notamment s’agissant du principe de non-discrimination. Je pense par exemple à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Cependant, cela permet au Parlement Européen de communiquer son positionnement de façon claire et transparente sur le sujet, alors que 11 pays ont encore des dispositions qui prévoient la peine de mort pour homosexualité ».
76crimes : « Que contient cette résolution ? »
Pierre Karleskind : « La résolution stipule entre autres, l’abolition de la peine de mort, le renforcement de la diplomation internationale en faveur de la dépénalisation universelle de l’homosexualité, avec une implication si possible des Nations-Unies autour de cette question.
Concernant l’Ouganda, la résolution enjoint à un régime de sanctions fermes à l’encontre de ce pays, ainsi que des États qui continuent de pénaliser l’homosexualité. Aussi, plus que jamais, la résolution appelle à astreindre le régime de libre-échange ou d’accords douaniers préférentiels, au respect des droits humains.
De plus, la résolution souhaite voir étendre le régime européen de sanctions aux visas et aux interdictions de voyage sur le territoire européen, pour les responsables politiques, ainsi que ceux issus de la société civile, à l’origine de l’introduction de la proposition de loi en Ouganda.
Enfin, la résolution enjoint l’Europe à une diplomatie ambitieuse, avec l’évocation d’un fonds en faveur de la dépénalisation universelle de l’homosexualité, à destination des activistes et des avocats qui entreprennent de saisir les juridictions locales, pour faire abolir les lois LGBTphobes ».
76crimes : « Quelle suite politique comptez-vous donner à cette résolution ? »
Pierre Karleskind : « A l’échelle européenne, il faut que notre diplomatie soit moins passive. On espère un changement en ce sens de la part de Josep Borrell qui est le vice-président de la Commission européenne, ainsi que le représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.
Enfin, au Conseil des Nations Unies, il faut avancer sur les dossiers en lien avec le commerce international, avec davantage de clauses suspensives en cas d’aggravation des violations des droit humains ».
Articles connexes :
- Un militant des droits LGBTI du Bangladesh trouve du soutien en France (10 avril 2023, 76crimesFR.com)
- Sénégal : État des lieux de la situation des personnes LGBTI en 2023 (30 mars 2023, 76crimesFR.com)
- Une conférence à Paris pour la dépénalisation de l’homosexualité (16 mars 2023, 76crimesFR.com)
- Cameroun : les activistes dans la panique (25 janvier 2023, 76crimesFR.com)
- Niger : le Niger s’apprête à pénaliser l’homosexualité et à rendre le « mariage gay » passible de la peine de mort (22 janvier 2023, 76crimesFR.com)
Pingback: France : « Il faut défendre les interventions en milieu scolaire ! | «76 Crimes en français