Mokolo, ville de l’extrême-nord Cameroun, située à quelques kilomètres de Maroua, capitale de la région, a été le théâtre d’une chasse aux homosexuels présumés de cette ville au début du mois d’avril.
Par Erin Royal Brokovitch

La localisation de Mokolo au Cameroun.
La matinée du 07 avril dernier, toute la ville de Mokolo, située à environ une heure en voiture de Maroua, est en effervescence. On cherche chasser, à « casser du pédé » , durant toute la matinée. Les boutiques de riches commerçants réputés de la ville accusés d’être homosexuels sont saccagées, pillées, leurs maisons incendiées par la population en furie, tel que rapporte un observateur des droits humains dans cette zone. Selon lui, les pilleurs promettent ne pas s’arrêter là.
Il s’agit en fait de l’expression de la révolte de la population au phénomène d’homosexualité qui est mis à nue dans cette ville depuis quelques jours auparavant.
L’affaire commence une semaine plus tôt quand un jeune garçon va se plaindre chez le lamido (autorité traditionnelle et leader réligieux), d’avances qu’il subit de la part d’un commerçant. Il raconte que celui-ci lui a fait une cours assidue, l’invitant à entretenir une relation amoureuse avec lui. Comme pour le convaincre d’accepter ses avances, le déculpabiliser afin qu’il se décide, le soupirant lui a montré via leur conversation Whatsapp plusieurs photos d’autres personnes parfois insoupçonnables qui seraient aussi gays.
Le jeunhomme, choqué par ces avances, s’en ira alors se plaindre auprès du lamido, lequel entreprend d’aller porter l’affaire au substitut du procureur. Etrangement, le substitut du procureur convoque plutôt le jeunhomme qui s’est plaint et le place en garde à vue.
La population informée de cela, y croit voir donc l’influence et les pratiques révélées d’un lobby gay dans cette ville et se révolte. Ce qui débouche sur les événements de cette matinée du 07 avril.
C’est aussi une opération de soulèvement de la population contre les autorités qui est engagée là ! Dans cette zone conservatrice où l’homosexualité est encore très taboue, la population croit voir un phénomène d’homosexualité doublé de trafic d’influence d’un lobby qui s’est déjà établit et qui voudrait par ses pouvoirs pervertir toute la ville…cela passe mal dans les esprits.
Le jeunhomme est remis en liberté après quelques jours de garde à vue devant un tel soulèvement. Quand aux commerçants pourchassés et dont les biens et boutiques ont été saccagés, ils réussissent s’enfuir vers la Nigéria, pays frontalier. Et échapper au pire, au bain de sang qui leur est promis.
Devant un tel déferlement populaire, peut-être ils n’ont-ils pas le temps ou n’osent-ils pas engager une contre action judiciaire pour se défendre. Toujours est-ils que sous le coup de la peur du pire, ils ont pris leurs jambes à leurs cous.
Erin Royal Brokovitch, l’auteur de cet article, est un militant pour les droits LGBTI au Cameroun qui écrit sous un pseudonyme.
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