Chaque année, des centaines de réfugiés LGBTQI quittent l’Afrique de l’Ouest pour rejoindre l’Europe. Kyne et Michel (pseudonymes), un couple LGBTQI camerounais a pris la décision de quitter le Cameroun pour suivre cet itinéraire dans l’espoir de se retrouver en sécurité en France.

Par Courtney Stans
Kyne a décidé de quitter le Cameroun en 2019 quand il s’est fait agresser par une foule sur un marché de Douala. Un vendeur l’a reconnu et l’a traité de « pédé » alors qu’il faisait ses courses. Une foule s’est amassée autour de lui et menaçait de le déshabiller. Kyne a demandé leur clémence et ils l’ont laissé s’en aller.
Les camerounais LGBTI doivent toujours être sur leurs gardes pour ne pas faire face à ce type de situation. L’année dernière, des organisations de défenses des droits LGBTQI ont délivré un rapport où sont enregistrés 2 031 cas de violence et autres violations des droits humains contre les personnes homosexuelles au Cameroun. Ces incidents comprennent des abus physiques et verbaux de la part des membres de la famille, des voisins et de la police.
L’ homophobie est très présente dans la nation, excluant la majorité des personnes LGBTI. Certains se retrouvent souvent contraints à fuir le pays malgré leur condition sociale (sans emploi, sans formation, sans revenus fixes, sans domicile etc.)
De nombreuses personnes LGBTI aspirent à une vie meilleure et prennent le chemin du désert pour atteindre l’Europe. Sans visa ni passeport, armées de leur courage et de leur détermination, ils quittent leur pays natal pour une vie sans discrimination que ce soit sur leur orientation sexuelle, leur genre, leur identité et leur expression de genre.
C’est le rêve de Kyne et de son partenaire Michel. Ils ont demandé un visa officiel pour se rendre en France. Néanmoins, ce dernier leur a été refusé.
Ils ont alors décidé de rejoindre la France par leur propres moyens et ont économisé près de 400 000 francs CFA (environ 700 $ US). Pour préparer leur voyage, ils ont essayé d’entrer en contact avec des personnes qui avaient déjà fait ce voyage mais cette démarche n’a pas porté ses fruits.
En mai 2020, ils ont traversé le Nigeria, le Bénin, le Niger, le Mali et l’Algérie en bus et à pied. Ils ont dépensé environ 300 000 francs CFA (environ 540 $) en tickets de bus. Sans guide, ils se sont appuyés sur les expériences de leurs partenaires de voyage qu’ils ont rencontrés sur la route. “Nous voyagions souvent en groupe. Cependant, les dangers de la route ont coûté la vie à de nombreux compagnons de voyage », raconte Kyne. « Des voleurs de grand chemin ont battu certains d’entre eux à mort pour avoir refusé de leur remettre leur argent, certains sont morts de maladie ou sont morts de faim après avoir manqué d’argent” ajoute-t-il.
Selon lui, le voyage est encore plus dangereux pour les femmes réfugiées. Elles sont souvent violées parce qu’elles ne pouvaient pas payer leur passage, d’autres parce qu’elles tombaient sur les mauvaises personnes au mauvais moment. Certaines femmes ont été enlevées pour être vendues comme esclaves.
Des hommes ont également été violés pour ne pas avoir refusé de se laisser voler. Les voleurs utilisent souvent le viol comme moyen de pression pour que les groupes se laissent faire.
Kyne et Michel ont échappé de justesse à un enlèvement et ont failli être violés au Bénin et au Niger. Des bandits leur ont demandé de payer 100 000 francs CFA (environ 180 dollars US) pour passer un de leur barrage frauduleux. Ils ont refusé de payer ces derniers et se sont retrouvés forcés à entrer dans une pièce sombre où ils ont été déshabillés et maltraités. Deux jours plus tard, ils ont réussi à s’échapper en profitant d’un moment d’inattention.
“Une semaine plus tard, nous avons rejoint la Tunisie”, nous raconte Kyne. Aujourd’hui, un an après avoir foulé le sol tunisien, ils sont toujours à la recherche d’une opportunité pour aller en Europe.
Étnt donné que Kyne et Michel n’avaient pas d’autorisation officielle pour se rendre en Tunisie, ils sont obligés de se cacher. Sans papiers les autorisant à travailler, ils ne peuvent gagner de l’argent et poursuivre leur voyage. Ils vivent dans des maisons abandonnées sans eau ni électricité. Le couple nettoie chez des particuliers, lave des voitures ou fait d’autres petits travaux pour parvenir à se nourrir.
Ils n’ont pas été en mesure d’économiser l’argent nécessaire pour faire le voyage en bateau. Pour cela, il leur faudrait environ 600 000 francs CFA (environ 1 100 $ US). Kyne et Michel n’ont pourtant pas perdu espoir. « Nous avons eu la chance d’arriver dans ce pays mais ce n’est qu’une escale. En chemin, nous avons frôlé la mort mais nous sommes prêts à tout pour arriver en Europe. Nous avons perdu 22 amis LGBTI de différentes nationalités au cours de notre trajet. Souvent, ils n’avaient pas les moyens pour payer leur passage auprès des bandits ou voleurs rencontrés en chemin, certains ont perdu la vie, d’autres ont été abusés sexuellement ou ont été mis en esclavage. »
« Nous prions les pays membres de Nations Unies : la France, la Belgique, l’Espagne, la Suisse, les USA, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Italie etc. d’agir pour faciliter le déplacement des personnes LBGTI ainsi que le processus de demande d’asile. Ne nous laissez pas mourir ! Permettez-nous de réaliser nos rêves et de vivre des vies normales sans discriminations. »
L’auteure de cet article, Courtney Stans, est une journaliste camerounaise qui écrit sous un pseudonyme. Contactez-la à info@76crimes.com.
Bonjour Moi aussi j ai un témoignage à faire pour tout ce que j ai vécu au Cameroun avant de fuir et me retrouver en Turquie
Envoyé de mon iPhone
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