Afrique subsaharienne

L’impact du coming-out de Brenda Biya sur les droits LGBTI au Cameroun

Brenda Biya, fille du Paul Biya, président du Cameroun depuis 1986, a révélé son amour lesbien sur Instagram.

Brenda Biya a publié cette photo d’elle en train d’embrasser Layyons Valença (@Laoncita) sur Instagram avec une légende indiquant « Je suis folle de toi et je veux que le monde le sache ».

Un coming-out fracassant

Les militants des droits LGBTI estiment que la nécessité d’abroger les lois anti-homosexualité au Cameroun est devenue évidente, maintenant que la fille du président camerounais de longue date Paul Biya a reconnu son amour envers une autre femme.

Sur Instagram, Brenda Biya a publié le 30 juin une photo d’elle en train d’embrasser sa petite amie brésilienne, Layyons Valença (@Laoncita), avec une légende indiquant « Je suis folle de toi et je veux que le monde le sache ».

La famille Biya a cherché à démentir, tandis que les militants des droits LGBTI ont salué l’opportunité de discuter de l’article 347-1 du Code pénal, qui prévoit jusqu’à cinq ans de prison pour les relations intimes entre personnes de même sexe.

Des remous au sein du clan Biya

Ainsi, le frère de Brenda Biya, le Dr Georges Gilbert Baongla qui préside du Parti républicain du Cameroun – un petit parti d’opposition – s’est fendu d’une déclaration dénonçant le débat national entourant le coming-out de sa sœur, préférant y voir des gesticulations ainsi que des tentatives de discréditer sa famille.

Aussi,il prévient que de telles attaques ne seraient pas sans conséquence : « J’informe le public au sujet de quelques petites médisances qui sont faites en l’endroit de ma petite sœur Brenda Biya visant à ternir l’image de la famille présidentielle dont le père de famille demeure le président de la République Paul Biya, le chef de l’État… Je fais une mise en garde à quiconque osera s’attaquer à notre famille. Ce dernier aura la bonne réplique ».

Georges Gilbert Baongla (Photo du Parti républicain /Jeune Afrique)

Une divine surprise et un espoir pour Alice Nkom

Après avoir vu la photo sur Instagram, l’avocate camerounaise Alice Nkom, ardente défenseuse des droits LGBTQ+, a tenu à réagir également :

« Oui, j’ai vu les images de Brenda Biya sur le net. Et ma première réaction, c’est woaw ! Bravo, Brenda. Bravo, bravo, bravo ! Il faut beaucoup de courage pour être fille d’un chef d’état d’un pays qui réprime l’homosexualité et dévoiler la sienne de la meilleure manière qui soit. Il faut beaucoup de courage et ça, ma fille Brenda, tu en as !

C’est ce que manque à beaucoup de Camerounais aujourd’hui, le courage. Sache simplement qu’être comme tu es, c’est ce que nous voulons voir dans tous nos enfants, c’est à nous de les accepter tel que Dieu nous les a envoyés.

Alice Nkom (Photo du Daily Beast)

En ce qui concerne ton homosexualité, ma foi, quelle belle chose. Tout le monde voit aujourd’hui que tu es heureuse, tu es épanouie. Tu es dans ta peau. Tu n’as plus besoin de cacher ni même de te cacher cela à toi-même. Sache que tu es la bienvenue dans mes bras, sache que pour moi aujourd’hui, je dois te dire que tu as une deuxième maman.

Et je voudrais que tu envoies ainsi un message fort à tous ces parents qui osent dire, sans se cacher, sans avoir honte d’eux-mêmes que s’ils ont un enfant homosexuel, ils vont le jeter de la maison et d’autre vont plus loin. Ils vont les tuer. Je suis contente et je félicite tes parents de ne pas te tuer. De t’accepter telle que tu es.

J’ai entendu ta maman l’autre jour t’inviter à la fête du 20 mai (fête nationale camerounaise), comme toutes les mamans l’auraient fait. Pour elle, elle invitait sa fille, la fille camerounaise du chef de l’Etat, à une fête nationale. Ta place est parmi nous. N’hésite pas.

Je voudrais simplement que ce courage soit couronné d’un résultat pour les autres aussi qui eux n’ont pas ce courage. Je voudrais que tu leur inculques ce courage pour qu’enfin les homosexuels camerounais vivent autre chose que la loi scélérate qui se trouve à l’article 347 du Code pénal, afin qu’il disparaisse.

Et que ton père, que son cœur se ramollisse. Et qu’il se dise mais quoi, je suis un papa et ma fille est lesbienne et alors ! Et que ça l’amène à dire la même chose en tant que législateur, à tous les autres parents, mais aussi à tous les éléments de la communauté LGBT du Cameroun.

Et qu’il fasse retirer cet article scélérat du Code pénal qui n’honore pas l’état de droit du Cameroun, c’est tout ce que je peux te souhaiter. Sois la bienvenue. We love you ! »

Une hypocrise qui doit cesser

Working for Our Wellbeing, une association de défense des droits LGBTI, a également rappelé l’espoir que le coming-out de Brenda Biya conduise à terme à la dépénalisation de l’homosexualité au Cameroun.

Logo de Working for Our Wellbeing

Et son directeur, Hamlet Nkwain, de s’interroger : « La liberté dont jouit Brenda Biya sera-t-elle étendue à tous les citoyens LGBTQ+ du pays ? »

Aussi dans son dernier communiqué, l’association souligne la corrélation entre homophobie et « inégalités », affirmant que le régime en place refuse la « liberté sexuelle » aux autres qu’il accorde aux siens, dans une construction sociale de « privilèges » sociaux, alimentant des injustices et des « disparités », autant qu’un « cycle de peur » et de « marginalisation » envers les gays et les lesbiennes qui ne font pas partie du sérail du pouvoir en place.

Enfin, Working for Our Wellbeing souhaite se saisir de cette affaire afin d’entrevoir une opportunité de bâtir un dialogue avec les autorités locales pour pouvoir réfléchir à des changements de paradigme sur le front des libertés.

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