Le 25 mai dernier, le porte-parole du gouvernement sénégalais, Amadou Moustapha Ndieck Sarré s’est exprimé concernant les travaux en cours au parlement portant sur un durcissement de la criminalisation de l’homosexualité au Sénégal, sous la pression du groupe islamiste « And Samm Djikko Yi » (« Ensemble pour Protéger les Valeurs » en wolof).
Pour rappel, au titre de l’alinéa 3 de l’article 319 de la loi n° 65-60 du 21 juillet 1965, est passible d’un emprisonnement d’1 à 5 ans, ainsi que d’une amende comprise entre 100 000 à 1 500 000 francs CFA (de 150 € à 2 200 €), toute personne ayant commis un « acte contre nature avec un individu de son sexe ».

La pression des islamistes
Cette réaction gouvernementale fait suite à de nombreuses manifestations et sorties dans les médias de l’imam Babacar Sylla. Il représente la principale organisation nationaliste et religieuse ayant décidé de faire de la « lutte contre l’homosexualité », une véritable mantra politique pour pouvoir peser dans le débat public.
En effet, après le renouvellement du parlement en novembre dernier, d’aucuns dans les cercles islamistes s’indignaient de ne voir poindre une nouvelle proposition de loi anti-LGBT+ à l’horizon du calendrier parlementaire.
Or ce devrait être désormais le cas, même si une grande opacité demeure autour des contours de ladite proposition de loi à l’étude.
Une démarche démagogue pour d’autres
Aussi, il est à noter qu’il s’agit de la 4ème initiative parlementaire en la matière en 10 ans, après celles de 2016, 2021 et 2024.
Le dernier texte en date l’an dernier inspiré par « And Samm Djikko Yi » prévoyait des condamnations allant de 10 à 15 ans de prison ferme en créant des « délits de bisexualité, de transsexualité, de nécrophilie et de zoophilie » , assortis d’une amende pouvant s’élever jusqu’à 5 millions de francs CFA (7600 €), dans un pays où le revenu moyen mensuel est inférieur à 200 euros par mois.
Pour Mouhamadou, un cadre supérieur dakarois d’obédience panafricaine, « il s’agit ni plus ni moins d’hypocrisie », peste-t-il, non sans lassitude quant aux moeurs politiques de son pays qui « l’écoeurent » assure-t-il.
Pour Sadio (pseudonyme), un observateur de la vie politique locale, « les équipes du Pastef (parti politique au pouvoir) doivent gérer un exercice politique subtil en donnant des gages à la fraction la plus conservatrice parmi leurs soutiens, sans pour autant faire basculer la démocratie sénégalaise dans une forme de terrorisme d’Etat anti-LGBT+, avec des politiques de terreur visant à l’éradication sociale des homosexuels ».
Le régime envoie un signal à la diplomatie européenne
« Dans ce contexte l’initiative de l’ambassade des Pays-Bas à Dakar de faire une projection d’un film consacré aux communautés LGBT+ a été jugée particulièrement malvenue, même s’il ne s’agit pas d’ingérence étrangère dans le débat parlementaire », ajoute-t-il.
« Cependant encore une fois ce type d’incident accompagné des protestations diplomatiques du Sénégal font les gorges chaudes des homophobes », déplore-t-il.