Alphonse Mihigo de l’organisation non gouvernementale (ONG) Actions pour la Lutte Contre les Injustices Sociales (ALCIS) relate de nouvelles exactions à l’encontre des personnes LGBT+ survenues le jeudi 10 juillet à Bukavu, dans le Sud-Kivu, dans l’Est de la République Démocratique du Congo, sous la coupe des rebelles rwandais du M23 depuis le 14 février.
Pour 76crimes, il témoigne d’un intense détérioration de la situation des droits humains sur place, dans une certaine indifférence de la communauté internationale.

L’homophobie en contexte de guerre
Alors que les pressions homophobes de l’ancien ministre de la justice, Constant Mutamba, ont duré pendant toute l’année 2024, avec plusieurs courriers à l’adresse des procureurs afin d’instruire une chasse aux homosexuels extra-légale [NDLR : l’homosexualité n’est pas pénalisée de jure en République Démocratique du Congo]; l’année 2025 a été rythmée par l’extension du conflit armé entre les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda et l’armée congolaise.
Et si un accord de paix vient d’être signé entre le Rwanda et la RD. Congo le 27 juin dernier à Washington, aux Etats-Unis, prévoyant le retrait des forces rebelles dans les 90 jours; sur place le M23 qui n’a pas pris part directement à l’accord fait toujours régner sa loi en mettant la population locale en coupe réglée.
Alors que les armes continuent de parler dans le Nord-Kivu autour de Walikale, dans les zones occupées par la rebellion, les populations se livrent à des délations favorisant des exactions dont les personnes LGBT+ font une fois de plus les frais, alors que la Cour Pénale Internationale (CPI) poursuit ses enquêtes sur les crimes de guerre survenus dans la région.
Une nouvelle attaque anti-LGBT+
Ainsi, le jeudi 10 juillet, une maison abritant des personnes transgenres a été vandalisée après une dénonciation des riverains auprès des forces occupantes. Par chance, l’ALCIS avait été prévenue de l’imminence de l’attaque ébruitée, mais le domicile a été entièrement saccagé.
Alphonse s’en explique : « face aux stigmates et aux discriminations et afin aussi d’éviter l’isolement, les personnes LGBT+ se regroupent fréquemment entre elles au sein de maisons qu’elles louent, pour pouvoir éviter les interactions avec le reste de la population, car à plusieurs l’on est moins seul ».
Il poursuit : « loin d’être l’oeuvre de riverains ou d’individus isolés, les incitations à mettre en danger la vie des personnes LGBT+ pour pouvoir attenter à leurs vies sont encouragées par des églises de réveil qui agissent en complicité avec le M23 quand elles ne commanditent pas directement les attaques qui nous visent ».
La responsabilité des Eglises dans les violences
« Pour 100 dollars américains les rebelles sont prêts à tuer quiconque et j’affirme que les Eglises ont payé la soldatesque du M23 pour exécuter des personnes LGBT+ au cours de l’attaque préméditée jeudi dernier », enfonce-t-il.

« Si les coupables sont assurément les groupes armés rwandais, les responsables sont le pasteur de l’Eglise Sainte-Montagne à Ibanda, ainsi que le pasteur Daniel Tchibo de l’Eglise Rehema qui se répand régulièrement en appel à la haine LGBTphobe, en langue swahili, sur les ondes radiophoniques de la station Sauti ya Rehema (Voix de la Miséricorde en français) », ne manque-t-il pas de souligner.
« Enfin, il ne faut pas oublier le cas de 3 femmes transgenres emmenées dans une caserne militaire le 22 avril et dont on est toujours sans nouvelles« , ajoute Alphonse.
Dans ce contexte de crise aigüe, l’ALCIS poursuit tant bien que mal un travail d’orientation des usagers vers des organisations partenaires tels que Médecins du Monde, afin de favoriser la prise en charge psycho-sociale ou infectieuse des usagers selon leurs besoins.
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