Depuis le 20 janvier 2025, le gouvernement de Donald Trump s’est illustré par une série de mesures très défavorables à l’expression de genre des personnes trans, avec notamment la suppression de mot « genre » qui a été expurgé de la nouvelle sémantique de l’administration républicaine, au profit de la reconnaissance des deux sexes biologiques, féminin et masculin (ordonnance 14168). En outre, les personnes transgenres ont été bannies de l’armée (ordonnance 14183) ainsi que des univers sportifs Outre-Atlantique (ordonnance 14187).
Ursula (pseudonyme), une femme noire transgenre américaine discrète se pensant jusqu’alors intégrée et relativement à l’abri de la transphobie, livre ses sentiments sur les récentes directives et ordonnances anti-trans signées par Donald Trump, le 47 ème président des Etats-Unis.

L’Amérique sous son vrai jour
76crimes: « Que ressentez-vous avec cette avalanche de mesures coercitives envers les personnes transgenres ? »
Ursula: « Depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir avec sa prise de fonction le lundi 20 janvier dernier, on assiste à une libération de la parole avec des gens qui expriment tout haut se qu’ils disaient auparavant tout bas.
En fait, à partir du moment où les politiciens, le monde des affaires et les entreprises de la tech’ et de la Silicon Valley virent leur cuti au sujet du soutien aux personnes transgenres, c’est toute l’Amérique qui montre son vrai visage.
Étant une femme transgenre binaire opérée depuis de nombreuses années, les gens ne me remarquent pas au premier abord, à moins de taper mon nom sur les moteurs de recherche, ce qui hélas pour moi, finit par arriver assez fréquemment.
Ainsi, j’entends les commentaires au travail et dans la rue, à New-York où je réside et il y a comme un fond permissif dans l’air, en matière de transphobie, de gayphobie et de xénophobie.
Ici où là dans la Grande Pomme je peux entendre des remarques sur les étrangers surtout quand ils ont le malheur d’être trop différents : trop gays, trop efféminés, trop jamaïcains etc…
Mais ayant grandi dans ce pays, je ne suis pas non plus surprise et ce fond de haine a toujours été là, présent, enraciné.
Même du côté des grandes firmes florissantes, on se rend compte avec le démantèlement rapide des départements de diversité, d’équité et d’inclusion que tout cela n’était qu’un vernis cosmétique tandis que l’on sombre doucement vers la dictature de ce côté-ci de l’Atlantique.
Après les trans à qui le tour ?
C’est comme Hitler dans les années 20, 30, il parlait de s’en prendre aux Juifs ou d’annexer les Sudètes et l’Autriche et tout ce qu’il se promettait de faire, il le faisait pour le plus grand bonheur des capitaines d’industrie et d’une certaine bourgeoisie, tandis que les années faisant la répression ne touchait plus seulement les juifs, mais également les tsiganes, les homosexuels, les communistes, les étrangers, puis toutes les personnes opposées à l’ordre nouveau.
En Amérique, c’est le même drame qui se joue et les hommes noirs, arabes ou latinos hétérosexuels, chrétiens ou musulmans auraient tort de se réjouir de se qui advient aux personnes trans. Et c’est aussi pour cela que francophone, je souhaite avec ma famille pouvoir quitter au plus vite ce pays, du moins le temps que Donald Trump quitte les affaires et achève son mandat.
Néanmoins, de manière plus profonde, mon pays est en proie à ses propres démons et il faudra des années pour colmater les brèches béantes ouvertes par le trumpisme avec ses accès de brutalité, de racisme, de transphobie et de nationalisme ».
Le droit à l’indifférence a été oublié
76crimes: « Pour vous quelles sont les causes de cette haine ? »
Ursula: « Les conservateurs de tous poils ont fait de la question trans un abcès de fixation et de débats incessants alors que l’on ne représente que 1% de la population.
Cependant un militantisme trans activiste ayant perdu de vue le droit à l’indifférence a aussi une part de responsabilités selon moi. Par exemple, en tant que femme trans, je me suis faite opérée il y a plus de 20 ans pour pouvoir être en accord avec moi-même, loin de chercher à cristalliser l’attention de l’opinion publique ou à être un objet de débat politique et social.
D’ailleurs dans la rue, je suis une femme noire comme une autre et traitée en tant que telle, ce qui correspond à mes aspirations.
Or ces dernières années, les nouveaux vocables ont suscité plus d’incompréhension et d’incrédulité qu’autre chose, je prends pour exemple l’expression de « sexe assigné à la naissance ». En réalité on nait avec un sexe et on ne peut en changer tout au long de sa vie. C’est ainsi.
De même, les débats autour de la place des personnes non-binaires dans des prisons pour femmes, en dépit de leur expression de genre, ont suscité énormément de remous qui auraient pu être évités et qui ont donné inutilement du grain à moudre aux personnes les plus réactionnaires que comptent les États-Unis ».
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