
Après les festivités autour du 17 mai, lors de la journée internationale de lutte contre les homophobies et les transphobies (IDAHOBIT), Saint-Martin se tient prêt à faire face à toute nouvelle résurgence épidémique. Pour Safe SXM Alliance for Equality Foundation, Elie Touzé, le trésorier s’exprime dans les colonnes de 76crimes.
Quelles sont vos anticipations et perceptions face à la variole du singe ?
Elie Touzé : « Saint-Martin est une collectivité territoriale ayant des compétences élargies, aussi bien côté français que côté néerlandais de l’île. Néanmoins, ici, côté français, il s’agit d’une compétence étatique qui est coordonnée sur place par l’antenne locale de l’Agence Régionale de Santé (ARS) de la Guadeloupe.
L’ARS reste assez taisante concernant la variole du singe. L’expérience de la COVID amène les autorités à faire preuve probablement de prudence. Dans ce contexte, les associations locales de santé restent dans l’attente de plus amples informations, car il faut pouvoir comprendre cette maladie.
Ensuite, il se dit que les hommes gays sont très touchés pour l’heure par cette épidémie émergente. A vrai dire, je pense que cela soulève plus de questions que cela n’apporte de réponses. D’ailleurs, on ne sait pas très bien pour quelle raison cette épidémie de variole du singe se propage en dehors de son foyer endémique originel d’Afrique de l’Ouest.
Les hommes gays vont davantage consulter leur médecin quand ils font face à des problèmes de santé. Il y a peut-être là, un effet de loupe. En tout cas, il serait dangereux d’alimenter un relâchement de la vigilance dans le reste de la population, en stigmatisant les communautés LGBTI.
La seule bonne nouvelle est que la létalité de cette maladie est faible. Toutefois, en cas de nouvelles restrictions de circulation à l’échelle planétaire, cela pourrait porter un coup fatal à l’industrie du tourisme de l’île.
Localement, les gens ne nous posent pas beaucoup de questions sur la variole du singe, car elle n’est perçue ni comme un danger immédiat, ni comme un péril mortel. Cette maladie est perçue comme exotique et lointaine. De plus, avec l’expérience de la COVID et des catastrophes naturelles, les gens ont acquis une certaine résilience ici. Pour l’heure, je n’observe pas de panique sur les réseaux sociaux de Saint-Martin.
Après, il reste les églises. Des passages bibliques dans l’Apocalypse annoncent des épidémies destructrices dans les temps derniers. Confer Apocalypse 6.8. Cependant, je fais confiance en la science et en la connaissance du vivant, même s’il n’existe pas de vérité absolue, en raison de l’évolution de l’état de notre compréhension de l’épidémie ».
Comment s’est déroulé IDAHOBIT à Saint-Martin ?
Elie Touzé :« Le dimanche 15 mai était notre troisième marche dans les rues de l’île, depuis 2019. Il y avait une ambiance bon enfant, même si nous étions moins nombreux que l’an passé. De nombreux jeunes de 16 à 25 ans étaient là. On a même inauguré une fresque en plein Marigot, le chef-lieu de la partie française de l’île. Enfin, on a clôturé les festivités par un concours d’éveil à la citoyenneté, avec des discours, des chansons et des vidéos.
A l’avenir, on voudrait pouvoir faire une véritable « pride », festive. Toutefois, de nombreux jeunes issus des communautés LGBTI quittent Saint-Martin pour pouvoir faire leurs études ailleurs, en Europe ou au Canada où les mentalités sont plus réceptives aux minorités sexuelles et de genre. Aujourd’hui, l’on relève que cet éloignement les empêche de revenir dans leur île pour venir célébrer IDAHOBIT.
Autrefois, les jeunes se rendaient en Guadeloupe pour pouvoir poursuivre leur cursus scolaire dans le secondaire où à l’université et la Guadeloupe a aussi l’atout d’être relativement proche de Saint-Martin (250 kms). Néanmoins, hélas, les mentalités y sont davantage homophobes et transphobes et pour les jeunes LGBTI de Saint-Martin, elle est moins attractive ».
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